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La vie rousse
1 novembre 2014

Les carnets pour les jours où l'on contemple trop - (Un billet entre parenthèses)


Avant je n'aimais écrire que sur mon blog multicolore que je considérais, à tort, comme un précurseur des réseaux sociaux. 
Je gardais mes carnets pour ne pas dessiner sur mes feuilles de cours ou, plus tard, sur mes fiches de travaux dirigés.

Maintenant les pensées me submergent. Je découvre un besoin d'écrire les impressions pour tenter d'en réduire le nombre. Je fais d'inombrables listes sur mon téléphone, sur des feuilles volantes, sur des fichiers d'ordinateur, sur des post-it dans l'entrée et dans le petit carnet bleu. Je prends des notes éparpillées (et sans grand intérêt) sur mon téléphone, d'autres fichiers d'ordinateur et le petit carnet bleu.
Tous les supports sont bons, sauf - par esprit de contradiction sans doute - mon journal intime, qui ressemble davantage à une série de rédactions obligatoires.
Ça se côtoie de façon anarchique: l'huile d'olive qu'il faut penser à acheter, un texte qui raconte une journée ou une personne, des phrases-anecdotes qui finissent par "et ça m'a fait sourire.",  des titres de chansons et de livres, des brouillons de lettres, des brouillons de cartes de voeux à écrire dans plusieurs mois, des adresses, des mots dont je ne connais pas la définition ou que j'aimerais utiliser plus souvent, des phrases qui essaient de décrire un aspect de moi, le basilic qu'il faut penser à acheter, des impressions de films, des flots de questionnements métaphysiques irrésolus depuis l'enfance, des périphrases formulées dans le bus ou dans mon lit, des citations, des digicodes, des phrases interrompues en cours de réflexion. Etrange collection.
Ici, j'accumule les brouillons, des billets fantômes que je ne publie pas parce que je me dis c'est n'importe quoi, il y en a déjà beaucoup trop. La sélection est un peu hasardeuse, je tape à toute allure (avec une grande impatience envers les mots qui ne s'affichent pas aussi vite que dans mon esprit) et certaines fois, le besoin de mettre en ligne dans la foulée est plus fort. Parfois je regrette un peu après coup, d'avoir été trop pressée, de ne pas m'être relue, d'avoir écrit et publié égoïstement sans partager substantiellement.

C'est un besoin que je connais mal et qui me surprend. J'ai l'habitude de le voir chez d'autres mais sans rien savoir de leur fonctionnement. Je ne sais pas comment l'accueillir temporellement et matériellement.
Est-ce que les personnes qui remplissent des carnets le font à heure fixe?
Est-ce qu'il est bon de collectionner les pensées? Faut-il les trier?
Est-ce que les pensées qu'on ne laisse pas s'envoler nous servent à éprouver le temps?
Est-ce qu'elles nous hantent davantage quand on les écrit ou quand on ne les écrit pas?
A quoi servent les inventaires du monde à travers soi?
Le temps n'est-il pas mieux employé quand on le dédie aux autres?


Je trouve étrange que le langage soit mon mode d'expression privilégié. J'ai du mal avec les mots, ils m'échappent souvent, me font défaut, n'arrivent pas dans le bon ordre. Je les trouve traîtres parce qu'ils me sont faciles quand l'humeur est gaie et le ton au rire; mais qu'ils me rendent muette, parfois au milieu d'une phrase, le reste du temps.
Je ne parviens pas à savoir pourquoi mon écriture est claire et convaincante sur dix-pages-deux-parties-deux-sous-parties-vous-avez-trois-heures-le-code-est-autorisé, et pourquoi dans une lettre, ils s'enlisent jusqu'à devenir parfaitement incompréhensibles. Construire quelques phrases simples lors d'une conversation orale me paraît parfois insurmontable. Les propositions ne coulent pas d'elles-mêmes, mes retours à la ligne traduisent le rythme saccadé de mes pensées et je n'arrive pas à apprivoiser le souffle.
Je pensais vraiment que j'allais me trouver un moyen. La musique, l'art, le jardinage, la cuisine... Un moyen d'expression qu'il faille aussi apprendre à maîtriser, mais qui serve doublement et qu'on puisse offrir.

Peut-être que dans six mois je jetterai mes carnets, mes feuilles et mes fichiers. J'annoncerai alors ici ma première exposition de sculptures en pâte à modeler (je sais déjà faire les ours!). Des sculptures qui figureraient tout à la fois les autres gens, l'été en automne et l'infinité qui ne se laisse pas appréhender.
Qui sait...

 

image
(Durant une autre saison, dans un autre continent, les chats restent songeurs et immobiles longtemps)

 

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Commentaires
K
Écrire partout et ne plus vraiment savoir finalement où, quoi et quand nous avons écrit. Écrire pour penser, penser que sa structure cette dernière. Se rendre compte qu'il n'en ait rien.<br /> <br /> Mais écrire encore.<br /> <br /> Et ces mots que tu partages prennent sens, prennent vie.<br /> <br /> Dans ma tête du moins.<br /> <br /> K.
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