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La vie rousse
6 octobre 2014

Où l'on apprend que finalement la photo a été prise en Grèce

 

 

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Le gris désespérément monochrome du mois d’octobre et la nuit qui tombe trop tôt m’auront convaincue de ne pas attendre davantage pour le porridge pomme-raisin-cannelle. Les vapeurs du thé et l’odeur sucrée se trouveront être de bonnes alliées face à l’attente pénible d’une sonnerie de téléphone qui n'arrive pas. Chez moi le téléphone est toujours source d’angoisse, même avec C. que j’ai préféré rejoindre au milieu de la nuit, il y a quelques mois, pour sangloter près de son visage endormi plutôt que de composer son numéro. C’est sans doute cette même angoisse qui m’aura arraché quelques larmes et un long silence, alors qu’une voix inconnue mais extrêmement douce me suggérait Peut-être que vous vous êtes inquiétée parce que je ne vous ai pas appelée.

Le mois d’octobre commence fragile. Je confie à une fille dont les collants m’ont fait grande impression dans l’amphithéâtre toute l’année, que je suis un peu cucu. Je dis cucu et pas fleur bleue, ni à fleur de peau, parce que je détonne déjà suffisamment entre son cynisme et celui de J., notre ami commun. J’essaie de savoir, sans y parvenir, si je trouve ça grave d’être devenue cucu. Je me demande aussi si on peut l'être sans être naïve et je m’y perds totalement.

L'idée même de fragilité m’a bouleversée un jeudi soir, à la dernière séance, quand YSL dont les traits se confondent somptueusement avec ceux de Gaspard U. se réfugie dans une réplique du lit de Proust, tandis que la belle voix de Jérémie R. affirme il est d’une immense fragilité qui le rend fou. Ce soir là je pense à toutes les personnes belles, fragiles et un peu abîmées, et j’ai envie de pleurer.
Quand le générique se finit, T. aussi a le souffle court, à cause de la beauté éblouissante des univers que Bonello tisse si bien. Pourtant, nous ne parvenons pas à partager nos émotions. Le film lui a donné envie de composer pour un défilé de mode, tandis que moi, il m’a donné envie - une fois de plus- de lire la Recherche. Je quitte un T. déçu sur le quai de la ligne 14, un peu mal à l’aise face à son insistance quant au dernier RER qu’il risquait de rater. La nuit j'écoute une émission de radio enregistrée par le frère de C. qui dresse des portraits sonores en quatre minutes trente-trois, que les personnes enregistrées comblent comme elles le souhaitent. Aucune des personnes n'affronte le silence de la même façon. Je finis par trouver doux d'entendre une voix familière occuper ses quatre minutes trente-trois sans avoir l'air d'y penser, en lançant Nina Simone, pas trop fort parce que le reste de la maison dort. Je m'en veux, quelques jours après, de rater l'exposition autour de ce joli projet.

 

Octobre commence également en indécision (elle s’accorde bien avec celle de Da Silva, Oh mon amour le temps/Ne suspend plus son vol/Atterré, atterris...). Je n’envoie pas la lettre à M. parce que ce qui y est écrit n’est déjà plus vrai.
Mes résolutions se sont envolées bien vite et je me suis retrouvée, entre le muesli et des fudges incroyables, à rire avec R. en inventant de nouveaux jeux. Plus tard, en dévalant son escalier de service, je ne savais plus qui du monde ou moi était à l’envers, ni ce qu’il fallait penser de ce concept nouveau d’amitié dérobée.
J’ai cru qu’on allait voir La Mouette, et puis non.
J'ai cru que j'avais cessé d'espérer, et puis non, et puis si, et puis non.
J’ai cru qu’on pouvait ne plus se parler, et puis non, et puis si, et puis je ne sais pas.
J’ai cru des choses différentes à propos de A. et d’un autre garçon et puis non pour l’un, et puis si pour l’autre, et puis je ne sais pas.

Pendant ce temps là, d’hésitations et de thés qui refroidissent, je fais semblant de ne pas savoir qu’il faut aller en cours et rendre des devoirs deux fois par semaine. Je me dérobe un peu terrorisée par ces obligations que j’arrive habituellement à dompter jusqu’en janvier. La motivation tarde à revenir et il y a longtemps que l’adrénaline n’est plus mon alliée.



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(Chez J.Demy et A. Varda. Décidément les mots de voisinage sont universellement savoureux.)

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